La vie après un cancer pédiatrique : guérir mais ensuite ?

Léo est un Aguerri et est en école de journalisme. Dans le cadre de ses études, il a réalisé avec ses camarades une grande enquête sur l’après-cancer pédiatrique. Nous leur avons proposé de la publier ici.

Si la guérison stoppe la maladie, elle ne garantit pas la fin des hostilités. Complications dues aux traitements, troubles psychiques, difficultés auprès des assureurs… Pourtant tiré d’affaire, l’adulte guéri d’un cancer pédiatrique peut de nouveau être amené à composer avec les blessures de son enfance. Entre études scientifiques et témoignages, lumière sur la face cachée de l’après cancer.

Clovis Afoukou, Léo Bagage, Iria Vilas Pascual

Des premières découvertes jusqu’au suivi à long terme : une histoire récente

Dans les années 1980 en France, des chercheurs découvraient les possibles effets à long terme des traitements contre le cancer pédiatrique. Depuis, instituts d’oncologie et anciens patients ont collaboré afin de permettre aux premiers de mieux cerner les besoins des seconds, pendant et après la prise en charge. Récit des événements qui ont abouti en 2011 à la création d’un suivi à long terme pour les adultes guéris d’un cancer pédiatrique.

Découvertes scientifiques et retour auprès des anciens patients

C’est à partir du début des années 1980 que les médecins prennent conscience des possibles conséquences à long terme des traitements contre la maladie : cancers dus aux irradiations et complications cardiaques causées par la chimiothérapie sont parmi les plus fréquentes, mais les effets secondaires restent très variables suivant les patients et les médicaments reçus. La capacité à guérir les cancers pédiatriques s’est développée à partir des années 1950, alors comment expliquer qu’il ait fallu une trentaine d’années pour en découvrir les effets sur le long terme ?
La plupart des complications ne deviennent apparentes qu’en fin de croissance ou à l’âge adulte, il n’existait donc pas suffisamment de cas d’étude jusqu’à cette époque. Par la suite, ce sont cinq instituts d’oncologie français (Institut Gustave Roussy à Villejuif, Institut Curie à Paris, Institut Claudius Régaud à Toulouse, Institut Lacassagne à Nice, Institut Godinot à Reims) qui, par le biais d’un questionnaire réalisé en partenariat avec l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM), vont recontacter tous leurs anciens patients guéris d’un cancer pédiatrique aujourd’hui adultes.
Après des années de travail et après avoir obtenu l’autorisation des assurances pour retrouver toutes les adresses, l’enquête, qui a pu débuter en 2005, se clôt en 2009. Ce ne sont pas moins de 88 % de réponses dont vont bénéficier les instituts pour perfectionner leurs connaissances des effets à long terme des guérisons. Il est également apparu qu’un certain nombre d’anciens patients tenaient à consulter à nouveau leur oncopédiatre afin de se réapproprier leur histoire médicale. Certains rapportent en effet qu’ils n’ont pas eu connaissance de leurs antécédents (guérison à un âge très jeune, parents protecteurs…) ou qu’ils regrettent un suivi psychologique insuffisant quant à l’intensité de leur expérience.

Des assurances discriminantes ?

Généralement, avant un prêt, les banques attendent du demandeur qu’il souscrive une assurance couvrant les risques de décès et d’incapacité. Mais voilà, un adulte ayant été guéri d’un cancer pédiatrique peut être considéré comme présentant « un risque aggravé de santé » par les assureurs, qui peuvent dès lors refuser de le couvrir, sinon avec des surprimes ou des exclusions de garanties. Cette situation a évolué avec l’actualisation de la convention AERAS (s’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé) en 2017 et la possibilité du Droit à l’oubli, qui permet au demandeur de ne pas déclarer son cancer au-delà de cinq ans après le protocole thérapeutique, sans rechute, si le cancer date d’avant ses 18 ans. Mais ce droit ne concerne pas les complications dues à la maladie et à son traitement, nourrissant de nouvelles surprimes un cercle vicieux jugé injuste et discriminant par la plupart des anciens patients.

La création des consultations de suivi à long terme

« Mon souhait était de créer une consultation pour ces anciens patients qui étaient quelques fois largués dans la nature, qui ne connaissaient pas les traitements qu’ils avaient reçus » déclare Odile Oberlin, oncopédiatre aujourd’hui retraitée, au sujet des anciens patients sortis de l’hôpital après leur guérison. Celle qui exerçait à l’Institut Gustave Roussy est à l’origine de la création des consultations de suivi à long terme, mises en place depuis 2011 dans certains centres en France. La consultation permet à l’intéressé de bénéficier d’un suivi permettant de détecter et de prévenir les possibles séquelles du traitement mais aussi de l’orienter vers d’autres spécialistes suivant les besoins : médecin traitant, psychologue, diététicien, assistante sociale, kinésithérapeute…
En lui réexpliquant sa maladie et en répondant à ses questions, l’idée est de permettre à celui qui avait été guéri d’un cancer durant l’enfance d’éclaircir certaines zones d’ombres de son passé médical, de se réapproprier certaines pages de sa vie.

Léo Bagage

Les Aguerris, une association qui regroupe des adultes guéris d’un cancer pédiatrique

Les Aguerris

Association Les Aguerris
Création : 2013
Site web : lesaguerris.org
Le Forum des Aguerris sur Facebook : accessible uniquement par des adultes ayant été guéris d’un cancer pédiatrique (205 membres)
Adresse : 52 rue Pernety 75014 Paris

« Les anciens patients ont trouvé le nom en cinq minutes, on n’a pas eu besoin de faire appel à une agence de com’, ça a fusé ! » raconte Odile Oberlin, oncopédiatre membre du conseil scientifique des Aguerris, une association qui regroupe d’anciens patients guéris d’un cancer pédiatrique. Il y a dans ce terme d’« aguerri » l’idée d’avoir traversé des épreuves et d’en être ressortis plus forts. Conférences, afterworks… Créée en 2013, l’association réunit des personnes qui ont souvent eu le sentiment d’être seuls face à leur histoire.

L’importance de dialoguer avec ses pairs

Si des associations de malades ou de parents de patients existaient déjà, elles concernaient surtout des personnes en cours de traitement. C’est à l’issue des premières consultations de suivi à long terme que les anciens patients se sont montrés ouverts à la proposition de réunir des personnes ayant été guéries d’un cancer pédiatrique. S’en suivent plusieurs réunions qui aboutissent finalement à la création des Aguerris, une association essentielle selon la présidente Cécile Favre : « C’est vrai que le cancer est souvent un sujet tabou, les anciens patients n’ont pas forcément envie d’en parler autour d’eux, ça les replonge dans une époque à laquelle ils n’ont pas envie de penser. Mais lorsque les aguerris sont entre eux, ils ont beaucoup plus de facilités à en parler, les échanges sont plus simples. »
Par un regard extérieur, Odile Oberlin tente d’expliquer ce qui relie ces personnes : « Ce sont des gens qui ont en commun d’avoir d’avoir traversé une expérience assez indicible qui les a fait grandir d’un coup. Jeunes, ils étaient déjà très matures et aspiraient à quelque chose de plus profond que les autres enfants. »
Les Aguerris se retrouvent régulièrement lors d’afterworks, organisés dans différentes villes françaises, l’occasion pour eux de partager leurs expériences ou de discuter d’autres sujets autour d’un verre, loin du cliché des réunions d’anonymes. Parler de son vécu n’y est pas obligatoire, quand certains en font part, d’autres préfèrent écouter : « parler de son expérience est une démarche entièrement personnelle, si la personne ne souhaite pas ou ne se sent pas prête à en parler, elle n’y est pas poussée » poursuit Cécile.
À noter que la crise sanitaire n’a pas empêché la poursuite des afterworks, bien au contraire. Les réunions se déroulent désormais à distance en visioconférence, ce qui permet aux aguerris des quatre coins du pays de s’y retrouver : « On a même eu des gens qui vivent à l’étranger » s’enthousiasme la présidente.
Néanmoins, les conférences nationales menées chaque année par l’association ont dû s’interrompre, ces dernières nécessitant une présence physique. Ces événements deviennent un lieu d’échange privilégié entre soignants et anciens patients. Ils permettent également d’informer sur les effets à long terme des traitements ainsi que de sensibiliser à ce sujet les pouvoirs publics et les partenaires de l’association.

Une collaboration très précieuse

Une association d’anciens patients est également essentielle pour les instituts d’oncologie pédiatrique, pour qui le travail accompli avec les anciens patients constitue une véritable collaboration.
Aujourd’hui, les instituts font valider les protocoles de traitement par d’anciens patients, qui s’assurent que les termes employés seront compréhensibles pour les parents de la personne traitée. Des enquêtes par les pairs, où d’anciens patients interrogent d’autres anciens patients sont également menées : « Les réponses données à un spécialiste et les réponses données à quelqu’un qui a vécu la même expérience sont différentes, elles nous permettent de mieux cerner leurs besoins » précise Odile Oberlin.
En retour, une association comme Les Aguerris se charge de transmettre les informations liées aux dernières avancées scientifiques aux anciens patients. Une collaboration qui aspire aujourd’hui à une meilleure connaissance des effets à long terme des traitements et par conséquent, à une amélioration des prises en charge actuelles, tant sur le plan médical que psychologique.

Article et encadré de Léo Bagage

Troubles psychiques : que se passe-t-il dans la tête après l’expérience d’un cancer pédiatrique ?

Les progrès dans le traitement du cancer pédiatrique a permis une grande amélioration des taux de survie et de guérison. Cependant des effets « secondaires » peuvent survenir tardivement, notamment d’un point de vue psychologique, et cela même après guérison complète. Ainsi des troubles comme l’anxiété, l’angoisse, des insécurités ou encore la dépression peuvent avoir lieu même après plusieurs années et l’âge adulte atteint.

1 enfant sur 440 est susceptible de développer un cancer avant l’âge de 15 ans.
Les cancers les plus fréquents chez les enfants sont la leucémie, les tumeurs du cerveau et les lymphomes.
D’autres moins courants peuvent cependant être aussi détectés comme le neuroblastome ou encore les tumeurs de cellules germinales entre autres.
Chiffres : Institut de veille sanitaire, 2010

56,2 % des adultes guéris d’un cancer pédiatrique souffrent de troubles psychiques (contre 31,9% pour la population générale).
27,7 % souffrent de troubles de l’humeur (contre 14,9%).
39,2 % souffrent de troubles anxieux (contre 24,8%) .
5,7% souffrent de stress post- traumatique (contre 2,1%).
Chiffres : études Salto, 2018

Un suivi ?

Bien que dans les pays développés comme la France il existe des centres spécialisés dans l’oncologie pédiatrique, le suivi après la maladie peut être déstructuré : jusqu’à il y a quelques années le suivi s’arrêtait lorsque le patient atteignait l’âge adulte ou lors que les risques de récidive se dissipaient. Une fois arrivé à l’âge adulte et guéri, le patient n’était plus pris en charge et donc n’était plus suivi.
Tomber malade d’un cancer pédiatrique peut causer des souffrances ; en effet, la maladie a lieu pendant une période où l’enfant se construit et se développe. Selon plusieurs témoignages, cela pourrait causer des difficultés comme par exemple avoir du mal à s’ouvrir aux autres, d’avoir du mal à accepter son corps après la maladie ou encore le refoulement de certaines émotions, pensées et questionnements. Pour citer l’oncologue Julien Taïeb : « La guérison est un réaménagement identitaire majeur pouvant entraîner parfois des difficultés psychiques secondaires ». En bref, le diagnostic d’un cancer (pédiatrique) a des répercussions psychiques sur le patient qui pourraient être classées comme « effet secondaire ».

L’importance de l’orientation vers des professionnels : se réapproprier son passé

Le cancer est la 1ère cause de décès par maladie chez l’enfant en Europe, et par conséquent en France aussi. En effet, l’expérience de la maladie et le fait d’avoir côtoyé la mort peuvent renverser l’enfant et cela peut durer jusqu’à l’âge adulte.
Ainsi certains « survivors » se retrouvent souvent en difficulté lors de la guérison et par conséquent, le retour à la normale, comme le dit Cécile Favre présidente de l’association Les Aguerris, se fait « tout en portant les blessures de leur hospitalisation ». Ce retour à une vie « normale » ne pourrait donc être complètement détaché de l’expérience d’un cancer pédiatrique. La présidente poursuit en se posant la question suivante : « qu’est-ce que la normalité après avoir survécu à un cancer pédiatrique ? ». C’est à cela qu’un suivi à long terme peut donc servir, non seulement d’un point de vue biologique mais aussi psychologique.
En effet, depuis 2011, des « consultations de suivi à long terme » sont mises en place pour les adultes guéris d’un cancer pédiatrique. Elles ont pour objectif de permettre au patient de reprendre son parcours par rapport à la maladie et les traitements reçus, de suivre d’éventuels effets secondaires survenus tardivement mais aussi de répondre aux questions que l’ancien malade pourrait avoir.
Ces séances se passent avec un binôme de professionnels, l’oncopédiatre est accompagné d’un médecin généraliste. Cependant, parfois cela peut être compliqué pour le patient de revenir dans le service d’oncopédiatrie. Une rencontre avec un psychologue est donc proposée avant la consultation médicale pour faire un point sur les ressentis et le vécu du patient vis-à-vis de sa maladie mais aussi pour permettre au patient de s’alléger de ses inquiétudes, Cécile témoigne : « Ça m’a permis de ranger toutes mes pensées dans les bonnes cases. Le fait de verbaliser nos pensées, ça enlève un poids à notre sac à dos. »

Article et encadré d’Iria Vilas Pascual

Clara : « La leucémie est une fragilité, il faut en tirer des forces »

Portrait : Huit ans après avoir été diagnostiquée d’une leucémie, Clara, 21 ans, nous fait part de son expérience. Membre de l’association Les Aguerris depuis plus d’un an, elle appréhende son ancienne maladie comme une fragilité de laquelle il faut tirer des forces mais aussi comme un changement sur sa vision du monde.

Une nouvelle vision du monde

C’est à ses 13 ans que Clara est diagnostiquée d’une leucémie. Très positive dans ses propos, on retrouve chez cette ancienne malade une présence d’esprit très forte. La maladie a changé sa manière d’appréhender le monde de plusieurs façons : professionnellement, elle décide « à la dernière minute » de changer son parcours et de partir en musicothérapie au lieu de suivre des études de vétérinaire.
Selon elle, ce serait la maladie qui lui aurait donné envie de se montrer présente pour les autres : « Il me paraît évident que le jour où j’aurais suffisamment de contrats et d’heures pour gagner ma vie si j’ai par exemple, une demi-journée de libre, je propose à l’hôpital du coin, au service d’oncopédiatrie et au service d’oncologie tout court en fait, d’offrir la musicothérapie ».
Sa façon de « vivre au jour le jour » est également une nouveauté. Selon ses parents, avant son passage à l’hôpital, Clara était quelqu’un qui ne vivait pas centré sur le présent : « avant je disais toujours : j’ai hâte de faire ça demain, j’ai hâte de faire ça cet été ». Cela a changé depuis, elle vit plus dans l’instant et cela s’est ressenti notamment lors du premier confinement, « ça m’a fait du bien car en début d’année j’étais partie dans le tout planifier, ça ne me convenait pas mais je n’arrivais pas à m’en détacher ».

Un avenir empêché

Si l’on sait que les assurances peuvent refuser de couvrir les anciens patients ou leur imposer des surprimes, voyager à l’étranger, le rêve de Clara, n’est pas non plus un chemin sans encombre. En effet, Clara est considérée comme une personne présentant un risque aggravé de santé et elle doit “mettre un pied” sur le sol français tous les 3 mois. De plus, le droit à l’oubli, dont elle ne bénéficie pas encore, ne prend pas en compte son diabète, effet secondaire des traitements.
Une situation que Clara, qui commence à perdre espoir, vit comme de la discrimination : « Je vis ça comme une double peine on va dire, il y a la peine de la leucémie et par-dessus ça on nous empêche de faire des choses d’un côté économique et politique. C’est de la discrimination légale. Si c’était illégal je pourrais me battre contre ça. Mais là, je ne peux pas car la personne en face aurait raison ».

Iria Vilas Pascual

Portrait de Frederick Lodjearem-Ndilbe : Président fondateur de l’association Enfants de chez nous

Cadre chevronné, titulaire d’un double master en finance puis en management qualité et développement durable, il est aujourd’hui très actif sous plusieurs casquettes. Frederick Lodjearem-Ndilbe, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est un entrepreneur Centrafricain. Frederick est également le président fondateur de l’association Enfants de chez nous. Une organisation à but non lucratif spécialisée dans l’assistance aux enfants malades de cancer et dont le siège se trouve à Brest en France.

Enfant de chez nous Sigle : EDCN (Enfant de chez nous)
Nature : Association loi 1901
Domaine d’intervention : Santé
Date de création : 09 Août 2018
Siège social : 2 Rue Amiral d’Estaing 29200 Brest (France)
Président : Frederick LODJEAREM-NDILBE
Représentant à Bangui : Philomène MBONDE
Représentant à Dakar : Alioune FALL
Représentant à Ouagadougou : Brice BADO
Facebook: Association Enfants De Chez Nous- EDCN
Abonnés Facebook : 1208
Site web : www.enfantsdecheznous.com

Derrière le parcours et cet engagement social débordant de Frederick, se cache en réalité une autre partie de son histoire. À 15 ans, alors qu’il préparait son brevet d’étude secondaire, Frederick avait été diagnostiqué d’un lymphome de Burkitt. Malade et très affaibli, il bénéficiera d’une évacuation sanitaire en France. S’en suivra une longue période de traitement et de suivi. Guéri et totalement rétabli, Frederick mène aujourd’hui une vie normale et épanouissante. Même s’il ne sera plus jamais le même.
« Je n’arrivais pas à accepter ce qui m’arrivait même si je comprenais à peine. Je savais juste que j’étais malade. Mais pourquoi moi ? C’était bien dur à supporter. Heureusement que ma mère était là à mes côtés » se souvient-il.
Après ses études, Frederick découvre en France des associations regroupant d’anciens patients. Il va vite se joindre à elles, ceci boostera chez lui l’envie de faire quelque chose, pour sauver les enfants Africains actuellement dans la même situation que lui il y a vingt ans.
Naîtra alors en France l’association « Enfants de chez nous ».
Une première représentation sera implantée à Bangui en Centre-Afrique. Suivront les représentations de Ouagadougou au Burkina-Faso et celle de Dakar au Sénégal dont les agréments sont en cours d’obtention. Les actions de cette association sont d’ores et déjà visibles, tant sur le terrain qu’en ligne : animations pour les enfants dans les hôpitaux, campagnes pour un diagnostic précoce de la maladie… Une véritable lueur d’espoir pour un continent où seulement 15%* des enfants atteints d’un cancer atteignent une unité de soin à l’hôpital.

Article et encadré de Clovis Afoukou
*Chiffres : Groupe Franco-Africain d’Oncologie Pédiatrique

Démystifier le cancer pédiatrique : interview avec Odile Oberlin, oncopédiatre à la retraite

Jusqu’à la fin des années quatre-vingt, le cancer pédiatrique était considéré comme un sujet tabou dans la société Française. A l’époque, certains parents cachaient à la famille et même à leur enfant malade, que celui-ci avait souffert d’un tel mal. Ainsi, nombre d’enfant ont également grandi sans véritablement savoir quoique ce soit de leurs antécédents médicaux. Pourquoi un tel mythe autour de cette pathologie ? Comment les idées ont telles pu évoluer dans le temps pour que naissent aujourd’hui des associations regroupant d’anciens patients et parents de patients ? Nous avons interrogé Odile Oberlin pour en savoir davantage. Oncopédiatre à la retraite depuis 2013 et aujourd’hui âgée de soixante-douze ans, elle est toujours active au sein de l’association Les Aguerris.

Clovis Afoukou : Pourquoi ce mystère autour du cancer pédiatre dans les années quatre-vingt ?
Odile Oberlin : Quand on était traité dans les années quatre-vingt, « cancer » était un mot qu’on ne disait pas. Ça restait tabou. Ce n’était pas très bien connu chez les adultes encore moins dans le monde des enfants. C’est comme cinquante ans plutôt, on ne parlait pas de tuberculose, car le diagnostic « tuberculose » conduisait à la mort. Donc parler de tuberculose c’est parler de quelqu’un qui va bientôt mourir. C’était la même chose pour le cancer pédiatrique.

CA : Avec un tel mythe autour de la maladie dans le temps, est ce que les malades savaient de quoi est ce qu’ils souffraient ou les parents le leur disaient-ils une fois adulte ?
OO : Les patients ne savaient pas, en tout cas pour beaucoup. Ils y a même des parents qui n’en n’ont jamais parlé à leur enfants. Nous avons effectué une étude en 1995 en envoyant un questionnaire à nos anciens patients pour savoir ce qu’ils sont devenus. C’était un succès avec 88% de taux de réponse !

CA : En tant que spécialiste que recommandez-vous pour éviter les cancers pédiatriques ?
OO : Le cancer pédiatrique ne peut malheureusement pas être prévenu ! On connait quelques facteurs d’ordre héréditaire, environnementaux et sanitaire. Mais prévenir serait vraiment compliqué. C’est pourquoi nous recommandons le dépistage précoce.

CA : La plupart des adultes qui ont développé un cancer pédiatrique se demandent souvent « comment cela est-il arrivé et pourquoi moi » ?
OO : Oui c’est surtout cela. Mais il est important de dire que ces personnes affrontent la vie de façon un peu différente des autres. Courage, bravoure, endurance etc. Il faut malgré tout accepter l’inexistence de réponses à certaines questions, apprendre à vivre et aller de l’avant.

Propos recueillis et transcrits par Clovis Afoukou.

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